Alfred Jarry

Alfred Jarry (1873-1907)

Il est peu d'exemples de disproportion aussi flagrante entre la notoriété quasi mythique d'un personnage et la méconnaissance à peu près générale de l'auteur et du reste de son oeuvre. En ce qui concerne Alfred Jarry, cela provient en grande partie du fait que la bibliographie 'jarryque' est quantitativement peu importante et, qualitativement, d'intérêt médiocre.
Effectivement, les articles et les ouvrages consacrés à Jarry sont étonnament peu nombreux. Il y a bien, chez Breton, dans son anthologie de l'humour noir, des références à peu près constantes au nom de Jarry mais le contenu articulé par ces écrits à propos de l'oeuvre est assez pauvre. Il n'empêche qu'aujourd'hui, Jarry est considéré à juste titre comme un des maîtres du surréalisme et que l'adjectif 'ubuesque'  est entré dans le langage courant.

Il est vrai que Jarry, tout en manifestant très vite des qualités d'écrivain assez étonnantes, n'eut pas une vie des plus passionnantes.

Fils d'un négociant, né à Laval en 1873, c'est à l'âge de treize ans qu'il écrit sa première oeuvre Ontogénie. Ballotté de Laval à Saint-Brieuc puis à Rennes, c'est néanmoins dans la capitale de la Bretagne qu'il rencontrera le fameux et malheureux professeur de physique M. Hébert, horriblement chahuté par une multitude d'élèves depuis plusieurs générations.
Cette rencontre avec M. Hébert, dit P.H., Père Heb, Eb, Ebé, Ebon, Ebouille qui est, depuis plusieurs années, le héros d'une farce potachique, abondante et multiforme, va donner naissance à Ubu roi. En effet, Jarry, remaniant  un texte ayant pour titre 'Les Polonais' et pour auteur son camarade de classe Charles Morin, rebaptisa définitivement notre héros (Ubu étant une nouvelle contraction d'Hébert).

Il est évidemment impossible de quantifier le nombre de modifications qu'a apportées Jarry au texte originel mais il est clairement établi aujourd'hui que c'est le talent et le génie de Jarry qui ont donné à Ubu ses lettres de noblesse littéraires.